
De la Décision du CNRA sur le cas Bassirou Diomaye FAYE.
« Président du Brésil entre 2003 et 2010, Luiz Inácio Lula da Silva entame une peine de prison le 08 avril 2018 à la suite d’une condamnation dénonçant la perception des pots-de-vin évalués à 3,7 millions de réaux. Ces fonds auraient été reçus lors de travaux d’un appartement à trois étages (communément appelé triplex) situé dans une ville du littoral de São Paulo. Ce procès s’inscrit dans le cadre de la 24ème étape de l’Opération Lava-Jato, déclenchée le 04 mars 2016. Cette action criminelle, inscrite sous le numéro 5046512-94.2016.4.04.7000, a entrainé la condamnation de l’ancien président Luiz Inácio Lula da Silva par deux instances. La première a été requise par le juge Sérgio Moro, membre de la Justice Fédérale du Paraná, le 12 juillet 2017, et la deuxième par la cour de juges de deuxième instance du quatrième Tribunal Régional Fédéral, le 24 janvier 2018, qui siège dans la capitale de l’État du Rio Grande do Sul. Lula a passé ainsi 580 jours incarcéré avant d’être libéré le 08 novembre 2019, après qu’une décision nationale a permis aux condamnés en deuxième instance de répondre à leur procès en liberté. En mars 2021, la Cour Suprême Brésilienne a annulé l’ensemble des accusations contre l’ancien Président.
Pendant sa première année d’incarcération, il lui est interdit de prendre la parole en public. Le droit de répondre aux interviews journalistiques ne lui est accordé qu’en avril 2019″*.
Alors si « la communication devient un outil de défense important pour Lula afin de contrer les arguments mettant en doute sa conduite morale », pourquoi le Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel (CNRA) empêche t il Bassirou Diomaye Faye d’exposer sa vision du Sénégal en sa qualité de Candidat a l’élection présidentielle de mars 2024 figurant sur la liste définitive publiée par le Conseil Constitutionnel ?
La loi électorale de notre pays ne distingue pas un candidat libre de ses mouvements du candidat en détention. Parce qu’en droit il n’est pas permis de distinguer là ou la loi ne distingue pas.
Les candidats définitifs a l’élection présidentielle sont égaux en droits et sont d’égale dignité. Peu importe leur situation géographique qui n’est qu’un détail de l’histoire face a leur statut juridique.
En l’occurrence, le statut juridique de Bassirou Diomaye Faye a déjà été apprécié par le Conseil Constitutionnel, qui n’en a pas fait un motif d’invalidation de sa candidature.
Par ailleurs, l’article 92 alinéa 5 de la Constitution du Sénégal affirme que les décisions du Conseil Constitutionnel s’imposent aux pouvoirs publics ainsi qu’aux autorités administratives et juridictionnelles.
Si la décision du CNRA de refuser la diffusion de l’enregistrement du Mandataire de Bassirou Diomaye Faye en lieu et place du Candidat n’est pas contestable au regard du caractère intuitu personae de la participation a l’élection présidentielle. La loi électorale est claire, seuls les candidats sont autorisés à procéder aux enregistrements sur la radiotélévision nationale (article LO 134 du Code électoral).
En revanche rien ne justifie que le CNRA refuse de prendre les dispositions pertinentes permettant la plénitude de jouissance de la liberté fondamentale d’expression de Bassirou Diomaye Faye.
Au-delà de cette violation des droits d’un candidat, on retiendra que le CNRA s’est soustrait à l’injonction de l’article 92 de la Constitution malgré qu’il l’ait visé dans sa décision.
*« Lula en prison » au Brésil : l’expression numérique de l’ethos de victime et de candidat sur Twitter Thais Barbosa de Almeida. Dans Les Enjeux de l’information et de la communication 2022/3 (N° 23/3)
Bouna Manel FALL,
Ancien Conseiller juridique au Ministère de la Communication, des Télécommunications et TIC,
Ancien Conseiller juridique au CNRA,
Enseignant en Droit des médias,
Président de SILEX (Savoir Information Liberté d’Expression).